L'évaluation du risque de récidive chez les délinquants autochtones

L'évaluation du risque de récidive chez les délinquants autochtones Version PDF (11Ko)

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Vol. 3 No. 2
Mars 1998

Question

Les facteurs du risque de récidive sont-ils différents chez les délinquants autochtones et les délinquants non autochtones?

Contexte

Parmi le nombre de délinquants pris en charge par les services correctionnels, il y a surrepré-sentation des Autochtones qui, bien qu'ils ne composent que 3 % de la population canadienne, représentaient 12 % des admissions à la probation en 1996-1997, au niveau provincial et territorial. L'une des tâches importantes qui incombent aux services correctionnels est de gérer le risque que présentent les délinquants. Pour ce faire, on effectue régulièrement des évaluations du risque de récidive. Mais la plupart des instruments d'évaluation du risque sont basés sur le délinquant non autochtone de sexe masculin. Il y a donc lieu d'évaluer la validité des échelles du risque pour les délinquants autochtones.

Méthode

Le choix de l'échantillon s'est fait à partir de la base de données tenue par les Services correctionnels et communautaires pour adolescents du Manitoba, laquelle compte près de 11 600 probationnaires adultes, hommes et femmes, ayant mené à terme leur période de probation entre 1986 et 1991. La base de données comporte également des renseignements sur un instrument d'éva-luation du risque utilisé au Manitoba. L'échantillon aléatoire final se composait de 903 délinquants, dont 513 non-Autochtones (56,8 %) et 390 Autochtones (43,2 %). De plus, l'échantillon des délin-quants autochtones était formé de 124 Métis, de 153 Autochtones inscrits vivant dans une réserve et de 113 Autochtones inscrits vivant hors réserve. Autochtone inscrit vivant dans une réserve ou hors réserve, désigne une personne ayant le statut d'Autochtone inscrit aux termes de la loi et qui habite soit dans la réserve, soit hors réserve au moment de son placement en probation.

Réponse

Pris ensemble et comparés aux délinquants non autochtones, les dé-linquants autochtones étaient plus jeunes, moins instruits, avaient plus tendance à être sans emploi, et leurs antécédents criminels remontaient plus loin. Qui plus est, dans les 3 ans suivant la fin de la surveillance dans la collectivité, 65,9 % des délinquants autochtones et 47,8 % des délinquants non autochtones ont récidivé. Le coefficient total du risque avait permis de prévoir la récidive à la fois chez les délinquants autochtones et les délinquants non autochtones, soit r = 0, 32 et r = 0, 36 respectivement. Presque tous les facteurs pris en compte par l'instrument d'évalua-tion du risque avaient permis de prévoir la récidive autant chez les délinquants autochtones que non autochtones, à savoir les pairs, la toxicomanie, les attitudes, l'emploi, les antécédents criminels, le sexe (homme), l'âge (jeune), les change-ments de domicile et la situation financière. Les relations familiales ou conjugales, l'aptitude intellectuelle et la scolarité ou la formation technique n'ont été des prédicteurs que chez les délin-quants non autochtones. Enfin, la stabilité émotionnelle n'a permis de prévoir la récidive pour aucun des deux groupes. Une décomposition poussée de l'échan-tillon autochtone a révélé que les facteurs de risque chez les délinquants métis se rapprochaient le plus de ceux des délin-quants non autochtones, si bien que tous les facteurs liés à la récidive chez les délinquants non autochtones se retrou-vaient chez les délinquants métis. La variabilité se situait au niveau des Autochtones inscrits; seuls 7 des 15 facteurs ont permis de prévoir la récidive chez les délinquants vivant dans une réserve et seuls 4 des 15 facteurs (encore moins) ont permis la prévision de la récidive chez les délinquants Autochtones vivant hors réserve.

Néanmoins, le coefficient total du risque et des besoins permettait de prévoir la récidive pour les quatre groupes.

Incidences sur les politiques

  1. La conclusion selon laquelle une échelle des risques et des besoins établie en fonction d'un échantillon non autochtone puisse permettre de prévoir la récidive chez les Autoch-tones fait ressortir l'utilité d'évaluer et d'appliquer des échelles semblables aux délinquants autochtones. Bon nombre des facteurs de risque associés aux délinquants non autochtones, y compris la toxicomanie, les pairs criminels et les antécédents criminels, s'appliquent tout aussi bien aux délinquants autochtones.
  2. La variabilité des facteurs de risque parmi les sous-groupes autochtones fait ressortir le besoin de reconnaître les différences existant entre les délinquants autochtones et celui de mener d'autres recherches afin de mieux cerner ces différences.

Source

Pour de plus amples renseignements

James Bonta, Ph.D.
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