Notes des comités parlementaires : Lutte contre les activités hostiles des acteurs étatiques

Service/organisme :

SSCN/SP

Réponse proposée

Conflit entre la Russie et l’Ukraine

Menaces à la démocratie

Si l’on insiste sur la désinformation et la manipulation de l’information sur le conflit entre la Russie et l’Ukraine

Si l’on insiste sur l’ingérence électorale

Si l’on insiste sur un Registre des agents étrangers

Contexte :

L’ingérence étrangère englobe les activités hostiles menées par des États étrangers ou leurs mandataires de manière délibérément secrète, malveillante, clandestine et trompeuse comme les menaces, le harcèlement et l’intimidation. Les États étrangers adoptent de telles tactiques dans des objectifs stratégiques, notamment pour rehausser leur influence géopolitique, faire avancer leur économie, ébranler l’ordre international fondé sur des règles, assurer leur stabilité intérieure ou faire des gains militaires. Certaines de ces activités peuvent cibler des résidents du Canada ou des institutions canadiennes pour faire avancer des intérêts stratégiques, au détriment de nos valeurs et de nos intérêts nationaux.

Dans le cadre de son mandat de faire enquête sur les menaces à la sécurité du Canada, le SCRS a vu des États étrangers cibler des institutions et des communautés du Canada. Quant à la GRC, elle sait que des activités illégales commandées par des États sont menées contre la population et les intérêts du Canada, et enquête sur ces activités dans le cadre de son mandat. Les activités potentielles d’ingérence étrangère peuvent avoir une vaste portée et prendre plusieurs formes, bien connues des services de renseignement. Par exemple, il peut s’agir de collecte de renseignements, des campagnes de désinformation ou l’utilisation de médias parrainés par un État ou sous influence étrangère, ou de l’utilisation de cyberoutils sophistiqués.

Plusieurs rapports font état de la menace d’ingérence étrangère qui pèse sur le Canada. Dans son rapport de 2020 rendu public en avril 2021, le SCRS indique que l’espionnage et l’ingérence étrangère ont atteint au cours de la dernière année des niveaux sans précédent depuis la guerre froide. Le rapport indique également que la pandémie de COVID-19 n’a pas mis fin aux menaces que représentent les activités d’espionnage et d’ingérence étrangère, qui s’intensifient même dans certains secteurs. Les activités d’espionnage et d’ingérence étrangère visent des entités canadiennes, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, et menacent directement la sécurité nationale et les intérêts stratégiques du Canada.

Par ailleurs, le rapport annuel publié en 2019 par le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement (CPSNR) décrit des activités d’ingérence étrangère, dont certaines menées par des acteurs malveillants contre des institutions canadiennes. Dans ce rapport, le CPSNR estime que la Russie et la Chine sont les pays les plus actifs au Canada, et formule des recommandations pour mieux protéger le Canada contre l’ingérence étrangère. Dans son rapport de 2020, le CPSNR souligne l’importance de la question au Canada, rappelant que la Russie continue à exploiter la diaspora et des organisations russes au Canada. Selon le Centre de la sécurité des télécommunications (CST), la plus grande partie des activités d’espionnage sont menées par la Russie, qui utilise des moyens cybernétiques clandestins pour subtiliser des renseignements protégés.

Le Canada surveille l’écosystème international de l’information pour relever la désinformation diffusée par des États étrangers, et connaît les campagnes de désinformation menées depuis longtemps par la Russie. C’est en diffusant de la désinformation que la Russie a justifié son invasion illégale de l’Ukraine, et le pays continue de manipuler l’information pour brouiller les faits et rallier sa population derrière cette invasion. Le Canada collabore avec des partenaires de l’industrie, de la société civile et du milieu universitaire pour reconnaître et contrer la désinformation russe sur la crise actuelle, et rendre la société plus résiliente devant la désinformation en Ukraine et dans le monde. Le Mécanisme de réponse rapide du G7, établi en 2018 et dirigé par le Canada, examine les menaces étrangères à la démocratie, y compris les efforts de désinformation menés par des États. Nous collaborons également avec des partenaires internationaux dans le cadre d’autres structures, dont l’OTAN, la Coalition pour la liberté des médias et la Freedom Online Coalition. Par l’entremise du Programme pour la stabilisation et les opérations de paix, le Canada a versé plus de 4,2 millions de dollars à des programmes entre 2019 et 2021, et le premier ministre a récemment annoncé 3 millions de dollars pour renforcer les communications stratégiques de l’Ukraine et rehausser la résilience des communautés ukrainiennes face à la désinformation. Nous agissons également pour empêcher la Russie de diffuser de la propagande et de fausses nouvelles sur les ondes canadiennes. Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) a interdit la diffusion de RT (anciennement connue sous le nom de Russia Today) par les fournisseurs de services de télévision canadiens, car sa programmation n’est pas dans l’intérêt du public et n’est pas conforme aux normes de radiodiffusion du Canada.

Menaces à la démocratie

Le Canada a observé la manipulation de l’information par des États et des régimes, dont la Russie, visant à miner ou délégitimer l’ordre international fondé sur des règles. La désinformation peut provenir de partout dans le monde et avoir de graves conséquences. En effet, elle peut poser une menace pour la sécurité des Canadiens, éroder la confiance dans nos institutions démocratiques et semer la confusion sur les politiques et les avis du gouvernement, y compris sur la pandémie de COVID-19.

Dans le cadre de leurs mandats respectifs, des organismes de la communauté de la sécurité et du renseignement du gouvernement du Canada luttent contre ces menaces. Le SCRS travaille en étroite collaboration avec des partenaires du gouvernement, à l’intérieur et à l’extérieur de la communauté de la sécurité et du renseignement, pour contrer l’ingérence clandestine, trompeuse ou menaçante qui présente un risque de préjudice important à nos institutions et processus démocratiques : le SCRS enquête depuis longtemps sur l’ingérence étrangère qui menace les processus et institutions démocratiques au Canada. Les renseignements et les évaluations du SCRS sont transmis aux échelons supérieurs du gouvernement pour éclairer les décisions et les politiques sur la lutte contre les menaces. Dans le cadre de son vaste mandat et en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par la loi, la GRC peut elle aussi surveiller, bloquer et prévenir l’ingérence étrangère.

Malgré la robustesse du système électoral du Canada, des acteurs malveillants ont cherché à cibler ses politiciens, ses partis politiques, ses élections et ses médias afin de manipuler le public canadien et ébranler la démocratie canadienne. Pour sensibiliser la population à ces menaces et renforcer les pratiques de sécurité, le SCRS donne des séances d’information sur les activités hostiles des acteurs étatiques.

La communauté internationale collabore pour contrer la manipulation de l’information, surtout la désinformation. Le Canada dialogue sur la menace et les possibles interventions dans le cadre de divers mécanismes bilatéraux et multilatéraux. Par exemple, vous représentez le Canada à la réunion ministérielle des cinq pays, un forum annuel où les ministres de la sécurité de l’alliance du Groupe des cinq se rencontrent pour discuter des possibilités de collaboration et pour partager des renseignements sur diverses questions de sécurité nationale, dont l’ingérence étrangère, notamment pour mettre en commun les approches et coordonner la réponse du Groupe des cinq. Dans le cadre de la réunion des ministres des cinq pays de 2021, les ministres se sont engagés à travailler ensemble, et avec des pays de même sensibilité dans le cadre de forums multilatéraux pour partager les expériences et mesurer les progrès accomplis vers la résilience collective dans les secteurs de l’université, de la recherche et du développement pour résister contre l’ingérence étrangère et le transfert indésirable d’informations.

Menaces contre les collectivités

La Russie et d’autres États étrangers tentent régulièrement de menacer et d’intimider des personnes du monde entier par l’intermédiaire d’entités étatiques et de mandataires non étatiques. Ces États mènent également des activités d’ingérence étrangère en sol canadien en faisant appel à leurs propres services de renseignement et de sécurité, ainsi qu’à des agents de confiance.

Bien que des États utilisent la menace et l’intimidation pour lutter contre la corruption ou appliquer les lois dans leur cadre juridique national, ces tactiques peuvent aussi servir de couverture pour faire taire des dissidents, exercer de la pression sur des opposants politiques et engendrer chez ces personnes, où qu’elles se trouvent, une crainte de la portée du pouvoir étatique.

Lorsque des États étrangers ciblent des personnes se trouvant au Canada, celles-ci peuvent ne pas savoir comment se protéger, ni qu’elles peuvent signaler ces activités aux autorités canadiennes. La crainte de représailles de l’État contre leur personne ou leurs proches, au Canada et à l’étranger, peut inciter les victimes à céder à l’ingérence étrangère.

Ces activités constituent une menace pour la souveraineté du Canada et pour la sécurité des Canadiens. Lorsqu’il reçoit des allégations d’ingérence étrangère, le SCRS peut, de concert avec les organismes d’application de la loi et en vertu des pouvoirs découlant de la Loi sur le SCRS, enquêter, conseiller et intervenir sur la menace, afin de protéger les Canadiens contre le préjudice et l’intimidation. En outre, les activités criminelles soupçonnées d’avoir un lien avec la sécurité nationale font l’objet d’une enquête par la GRC.

Interférence étrangère lors des élections de 2019

Pour lutter contre l’ingérence étrangère pendant les élections fédérales de 2019, le gouvernement a créé le Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignements visant les élections (MSRE). En tant que membre du Groupe de travail sur les MSRE, le SCRS a participé aux efforts de sensibilisation et a évalué les menaces d’ingérence étrangère pendant les élections fédérales de 2019, et la GRC a apporté son expertise en matière d’application de la loi. Le Groupe de travail sur les MSRE maintient ses activités, puisque les menaces pesant sur les institutions démocratiques, y compris l’ingérence étrangère et la désinformation, n’ont pas diminué.

Registre des agents étrangers

Les gouvernements et entités de l’étranger peuvent chercher à exercer une influence sur les politiques, les représentants officiels ou les processus démocratiques du Canada par des moyens légitimes et en toute transparence, notamment dans le cadre d’activités diplomatiques tout à fait normales. Toutefois, certains États étrangers se livrent à des actes d’ingérence étrangère dans le but de promouvoir les intérêts politiques étrangers et d’influencer les représentants officiels et décideurs fédéraux. Ils peuvent à ces fins employer des personnes, dont certaines peuvent être très en vue, pour qu’elles agissent en leur nom sans révéler leurs liens avec l’État étranger.

Les États-Unis et l’Australie ont adopté des registres d’agents étrangers pour obliger les personnes agissant pour le compte d’un État étranger à déclarer ces activités. De plus, le Royaume-Uni a annoncé son intention d’instaurer un régime semblable et a lancé des consultations publiques au sujet de projets de loi pour contrer les menaces étatiques en mai 2021.

Australie – Foreign Influence Transparency Scheme Act (FITS) (Loi sur la transparence des influences étrangères)

La FITS, administrée par le procureur général du pays, a été promulguée en décembre 2018 pour accroître la transparence des influences étrangères sur le gouvernement et la vie politique de l’Australie. Le régime est administré par le Attorney General’s Office. La FITS énonce des obligations d’enregistrement aux personnes et entités menant certaines activités, dont celles destinées à exercer, au nom de parties étrangères, une « influence politique ou gouvernementale ». Ces activités sont généralement définies dans la loi comme celles visant à exercer une influence sur, entre autres, les élections ou les votes fédéraux et les processus décisionnels du gouvernement australien. Les communications publiques et le soutien financier destinés à influencer les processus décisionnels gouvernementaux déclenchent également une obligation d’enregistrement en vertu de la FITS. Le registre n’a pas pour but de restreindre ou de criminaliser les activités légitimes pouvant bénéficier à des acteurs étrangers (gouvernements, entités ou individus). Il convient de noter que les ministres du Cabinet ont l’obligation à vie d’enregistrer toutes les activités qu’ils entreprennent au nom d’une partie étrangère, sauf en cas d’exemption.. Une personne agissant au nom d’une partie étrangère peut être sanctionnée pour avoir omis de déclarer ou de mettre à jour des informations auprès du gouvernement de l’Australie, pour avoir induit en erreur ou menti aux autorités, ou pour avoir détruit certains documents. Les sanctions pour les infractions à la FITS vont des amendes aux peines de prison de six mois à cinq ans.

États-Unis – Foreign Agent Registry Act (FARA) (Loi sur le registre des agents étrangers)

En vertu de la FARA, adoptée en 1938, certaines personnes agissant pour le compte de mandants étrangers (gouvernements, entités ou individus) et menant des activités, politiques ou non, doivent s’inscrire comme « agent étranger » auprès du Departement of Justice. La Loi oblige également les agents étrangers à divulguer publiquement, à intervalle régulier, leurs relations avec avec la partie étrangère, ainsi que de leurs activités, recettes et dépenses qui y sont liées.

Le premier objectif de la FARA est de rehausser la transparence de l’influence étrangère aux États-Unis en garantissant que le gouvernement et la population connaissent la source de certaines informations provenant de l’étranger et visant à influencer l’opinion publique, la vie politique et la prise de décisions aux États-Unis.

Les infractions délibérées à la FARA sont assujetties à des peines pouvant aller jusqu’à cinq ans de prison et/ou à des amendes pouvant aller jusqu’à 250 000 $. La Loi prévoit également des dispositions en matière civile autorisant le procureur général des États-Unis à demander une injonction obligeant une personne à s’inscrire en vertu de la FARA. Depuis 2016, des infractions à la FARA ont déclenché des enquêtes de contre-ingérence menées par le Federal Bureau of Investigation (FBI), dont certaines ont mené à des poursuites pénales et/ou à des procédures d’immigration contre des agents étrangers et des parties étrangères.

Contacts :

Préparé par : DGOSN/SSCN

Approuvé par : Dominic Rochon, sous-ministre adjoint principal, 613-990-4976

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