Sécurité publique Canada Table ronde nationale des droits des victimes - Rapport sommaire
Table des matières
- Sommaire
- Introduction
- Aperçu du Portefeuille de Sécurité publique sur les services aux victimes
- Bureau national pour les victimes d’actes criminels (BNVAC)
- Service correctionnel du Canada (SCC) – Programme national des services aux victimes
- Commission des libérations conditionnelles du Canada (CLCC) – Renseignements pour les victimes
- Séance 1 : Examen du système correctionnel et la mise en liberté sous condition
- Séance 2 : La Charte canadienne des droits des victimes et le droit de participation
- Aller de l’avant pour comprendre les besoins des victimes dans le processus correctionnel et de mise en liberté sous condition
Novembre 2017
Sommaire
Le 11 juillet 2017, le Bureau national pour les victimes d’actes criminels (BNVAC) de Sécurité publique Canada a rencontré des intervenants victimes et des organisations non gouvernementales au sujet du rôle des victimes dans le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et de leur droit de participation en vertu de la Charte canadienne des droits des victimes (CCDV). Cette table ronde a été divisée en deux séances.
La séance du matin, dirigée par l’Unité des politiques correctionnelles de la Division des affaires correctionnelles et de la justice pénale, portait sur l’examen de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et elle a permis aux intervenants de s’exprimer sur les principales étapes du processus correctionnel fédéral, plus particulièrement les suivantes :
- l’évaluation initiale du délinquant et l’établissement du plan correctionnel;
- le placement pénitentiaire des délinquants et les programmes;
- la mise en liberté sous condition et la surveillance dans la collectivité.
La séance de l’après-midi, dirigée par le BNVAC, portait sur la détermination des besoins de participation des victimes, des choix et des options à considérer pour accroître leur participation et leur expérience en général ainsi que des lacunes et des obstacles qui nuisent à la participation significative des victimes au processus correctionnel fédéral et de mise en liberté sous condition.
Les présentations et les discussions qui ont eu lieu pendant la table ronde ont fait ressortir le fait que malgré les progrès accomplis par le gouvernement pour favoriser la participation des victimes au processus correctionnel et de mise en liberté sous condition, il reste des défis à relever pour garantir que toutes les victimes d’actes criminels soient entendues au sein du système de justice pénale.
Le présent rapport résume les présentations en plénière et les multiples séances de discussion en sous‑groupes qui ont eu lieu pendant la journée. Les questions et les recommandations soulignées dans le rapport relèvent de la responsabilité du portefeuille de Sécurité publique Canada. Les suggestions et les recommandations relatives aux activités provinciale ou territoriale ou aux affaires relevant d’autres ministères fédéraux ne sont pas incluses dans le rapport. Cela dit, elles ont été communiquées aux partenaires concernés.
Table ronde nationale des droits des victimes
Introduction
Le 11 juillet 2017, le Bureau national pour les victimes d’actes criminels (BNVAC) de Sécurité publique Canada a organisé une table ronde nationale des droits des victimes au sujet du rôle des victimes dans le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et du droit de participation des victimes en vertu de la Charte canadienne des droits des victimes. L’événement a réuni des intervenants de différents horizons, notamment des victimes d’actes criminels, et des organismes qui fournissent des services aux groupes vulnérables, comme les Autochtones et les membres de la communauté LGBTQ2+.
La table ronde s’appuyait sur les séances précédentes de consultations auprès des intervenants qui visaient à encourager la participation des victimes d’actes criminels et des personnes pouvant être marginalisées par le système et les services offerts. Les objectifs de la table ronde étaient les suivants :
- définir les besoins de participation des victimes de délinquants sous responsabilité fédérale;
- déterminer des choix et des options à considérer pour accroître leur possibilité de participation et leur expérience en général;
- recenser les lacunes et les obstacles qui empêchent les victimes de participer pleinement au processus correctionnel fédéral et de mise en liberté sous condition.
Aperçu du portefeuille de Sécurité publique Canada sur les services aux victimes
La table ronde a commencé par un survol des programmes et des services actuellement offerts aux victimes par les partenaires fédéraux.
Bureau national pour les victimes d’actes criminels (BNVAC)
Un représentant de Sécurité publique Canada (SP) a expliqué que le BNVAC a été créé en 2005 pour s’assurer que le point de vue des victimes est pris en considération dans l’élaboration des politiques correctionnelles fédérales : afin d’offrir des renseignements généraux aux victimes sur les services correctionnels et la mise en liberté sous condition et de faciliter l’accès au personnel du Service correctionnel du Canada (SCC) et de la Commission des libérations conditionnelles du Canada (CLCC) dans le but de traiter les plaintes. Le BNVAC a également une fonction importante de coordination au sein du Portefeuille de SP et il œuvre auprès des victimes de délinquants sous responsabilité fédérale (qui purgent une peine de deux ans ou plus), des fournisseurs de services et du grand public pour faire mieux connaître les mesures fédérales d’aide aux victimes liées au système canadien correctionnel et de mise en liberté sous condition.
En outre, une brève description des publications suivantes disponible dans les deux langues officielles en ligneNote de bas de page1 et en version imprimée a été fournie :
- Affiche intitulée « Loi sur la Charte canadienne des droits des victimes » qui décrit les droits des victimes dans le continuum de la justice pénale;
- Dépliant portant le titre « Préparer les victimes d’actes criminels à la mise en liberté d’un délinquant sous responsabilité fédérale »;
- Affiche intitulée « Aperçu du système correctionnel fédéral et du système de justice pénale – Information et aide axées sur les victimes d’actes criminels »;
- Guide d’information pour venir en aide aux victimes : Le système correctionnel fédéral et la mise en liberté sous condition;
- Livret intitulé « Les victimes d’actes criminels se tiennent au courant » (disponible dans 20 langues).
Service correctionnel du Canada (SCC) – Programme national des services aux victimes
Un représentant du SCC a expliqué que le Service a pour mandat de fournir à la victime des renseignements sur le délinquant sous responsabilité fédérale qui lui a causé un préjudice – à partir du moment où la victime demande des renseignements (ou « s’inscrit » pour recevoir des renseignements) et tout au long de la peine du délinquant. Le SCC veut donner du pouvoir aux victimes en nouant un dialogue avec elles, en répondant à leurs questions, en leur fournissant les renseignements qu’elles veulent recevoir (voir l’article 26 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition {LSMLC}) et en leur donnant la possibilité de décrire les répercussions de l’infraction ou les infractions sur leur vie.
Commission des libérations conditionnelles du Canada (CLCC) – Renseignements pour les victimes
Le représentant de la CLCC a expliqué que la Commission est un tribunal administratif indépendant qui a le pouvoir de prendre des décisions sur la mise en liberté sous condition des délinquants sous responsabilité fédérale et des délinquants sous responsabilité provinciale (qui purgent une peine de moins de deux ans) dans toutes les provinces, sauf en Ontario et au Québec. Les victimes qui s’inscrivent auprès de la Commission peuvent recevoir certains renseignements sur un délinquant (voir l’article 142 de la LSCMLC), notamment son nom, la peine imposée et les dates d’admissibilité à la libération. Les victimes peuvent aussi participer au processus de libération conditionnelle en présentant des déclarations et des renseignements à la Commission pour sa prise de décisions et en se présentant aux audiences comme observateurs ou pour présenter une déclaration. Si la victime ne peut pas se présenter à l’audience, une déclaration par vidéoconférence peut être organisée; cela est fait au cas par cas. La victime peut aussi écouter un enregistrement sonore de l’audience à une date ultérieure.
Séance 1 : Examen du système correctionnel et de la mise en liberté sous condition
Sécurité publique Canada a consulté les intervenants au sujet du rôle des victimes dans le système correctionnel fédéral et le processus de mise en liberté sous condition, en mettant l’accent sur les principales étapes du processus correctionnel, à savoir : l’évaluation initiale du délinquant et l’établissement du plan correctionnel; le placement pénitentiaire et les programmes; la mise en liberté sous surveillance et sur la surveillance dans la collectivité.
Les objectifs de la table ronde étaient les suivants :
- obtenir les points de vue des participants sur les répercussions que les modifications aux dispositions législatives, aux politiques correctionnelles fédérales, aux procédures et aux programmes et pratiques ont eues sur la sécurité publique;
- la capacité des services correctionnels fédéraux de mieux contribuer à établir un système de justice pénale (SJP) plus inclusif, d’une manière qui correspond aux objectifs de ce système;
- chercher à obtenir des recommandations concernant les modifications aux dispositions législatives et des initiatives visant à mieux répondre aux besoins des victimes.
Direction des programmes pour délinquants et de la réinsertion sociale du SCC
Évaluation initiale et placement pénitentiaire du délinquant
Cette présentation était une synthèse de la gestion des cas et de l’évaluation des risques dans le système correctionnel du SCC. On y explique les principaux éléments du processus de gestion des cas, notamment l’évaluation initiale, le cadre de surveillance en établissement, le cadre de préparation des cas et de la mise en liberté ainsi que la surveillance dans la collectivité. On y met l’accent sur la façon dont l’évaluation initiale est réalisée et sur le cadre de surveillance en établissement.
Programmes destinés aux délinquants
La deuxième présentation faite par le SCC donnait un aperçu du Modèle de programme correctionnel intégré qui combine des éléments efficaces de l’ancien cadre de programmes du SCC (p. ex. toxicomanie, gestion de la colère, etc.) et des innovations plus récentes dans le domaine des programmes correctionnels. Au lieu d’offrir des programmes thématiques séparés, ce nouveau modèle intègre des thèmes visant à accroître la motivation et la conscience du comportement. En outre, il examine les pensées, les croyances et les attitudes, et permet de développer l’autogestion et d’établir des plans d’assistance postpénale afin de réduire la récidive. On a expliqué que le nouveau modèle comprend trois volets distincts pour les délinquants de sexe masculin : le programme multicibles, le programme pour délinquants sexuels et le programme pour délinquants autochtones. Les délinquantes ont également des programmes spécialisés.
Les participants ont fait les suggestions suivantes sur les programmes pour délinquants pour mieux aider les délinquants à se réintégrer la société et pour prévenir la victimisation future :
- donner aux délinquants une formation sur l’empathie ou sur l’incidence sur la victime afin d’aider les délinquants à mieux comprendre les répercussions de leurs crimes;
- offrir plus de programmes communautaires pour accroître le succès de la réinsertion sociale des délinquants;
- rétablir des programmes de réinsertion sociale comme Option-VieNote de bas de page2 et soutenir davantage le programme des cercles de soutien et de responsabilitéNote de bas de page3.
De plus, certaines questions ont été soulevées au sujet des modifications législatives apportées par le gouvernement précédent en matière d’examen de la libération conditionnelle et de la question de savoir si ces modifications aux dispositions législatives étaient vraiment centrées sur la victime et si elles facilitaient la réinsertion sociale en toute sécurité des délinquants.
Mise en liberté sous condition et la surveillance dans la collectivité
La troisième présentation faite par le SCC portait sur le processus correctionnel, y compris la gestion de cas efficace, la surveillance dans la collectivité et les types de mises en liberté sous condition dont peuvent bénéficier les délinquants sous responsabilité fédérale. Selon son mandat, le SCC doit aussi soutenir la réinsertion sociale des délinquants en toute sécurité grâce à un processus de libération structuré et surveillé.
Les intervenants se sont dits préoccupés par leur rôle dans le processus de mise en liberté sous condition, notamment les déclarations de la victime, par les obstacles à la participation à ce processus et par la communication avec les victimes à propos du processus de libération.
Déclarations de la victime
Plusieurs préoccupations et suggestions ont été exprimées aux dirigeants fédéraux par rapport à la structure de présentation des déclarations de la victime. Les voici :
- Des participants ont exprimé leur inquiétude à l’idée de décrire leur victimisation dans cette déclaration, car elle est communiquée au délinquant.
- Certains participants ont déploré la pratique actuelle de la CLCC, qui conseille aux délinquants de ne pas regarder les victimes pendant les audiences. Même si cette directive a été adoptée dans le but d’éviter que les victimes soient intimidées ou victimisées à nouveau, certaines victimes ne se sentent pas vraiment entendues quand elles lisent leur déclaration à l’audience puisque les délinquants ne les regardent pas.
- On a suggéré de donner aux victimes la possibilité de choisir où elles s’assoient dans la salle d’audience, puisqu’elles ne veulent pas toutes être derrière le délinquant. Dans certains cas, les victimes pensaient que le fait d’être automatiquement assises derrière le délinquant diminue leur rôle dans la procédure.
- Les victimes qui vivent dans des petites collectivités ou des collectivités du Nord peuvent être réticentes à l’idée de faire une déclaration de la victime, car il est possible que la famille du délinquant et la famille la victime vivent à proximité l’une de l’autre ou qu’elles se connaissent. Dans certains cas, la victime craint des représailles dans sa collectivité.
- Pour accroître la responsabilisation du délinquant, il a été suggéré de modifier la loi pour pouvoir désigner un représentant communautaire qui serait responsable des délinquants dans les petites collectivités et les collectivités éloignées où des agents de libération conditionnelle ne travaillent pas à temps plein et doivent s’y rendre régulièrement par avion.
- Des intervenants ont fait observer que la déclaration au nom d’une collectivité était mal connue et suggéré que l’information soit rendue plus largement accessible.
- Enfin, des participants se sont dits contrariés par le fait que les délinquants peuvent lire les déclarations de la victime bien avant l’audience et préparer leur réponse, alors que les victimes n’ont pas la même possibilité de répondre aux propos du délinquant à l’audience.
Obstacles à la participation au processus de libération sous condition
Un grand nombre d’obstacles à la participation efficace des victimes au processus correctionnel et de mise en liberté sous condition a été signalé pendant la période de questions qui a suivi cette présentation. Les voici :
- Les participants ont déploré l’absence de moyens de vidéoconférence; cela complique la participation des victimes aux audiences de libération conditionnelle, en particulier celles qui vivent dans des collectivités éloignées. La disponibilité systématique de la vidéoconférence partout au pays a également été relevée.
- Certains intervenants ont dit qu’il doit y avoir des interprètes aux audiences de libération conditionnelle afin que les victimes puissent être entendues et validées, peu importe les obstacles linguistiques.
- Un participant a expliqué que les délinquants ont actuellement le droit de changer la date de leur audience de libération conditionnelle à tout moment. Cela représente un obstacle à la participation des victimes qui doivent se déplacer pour se présenter à l’audience et impose un fardeau financier injustifié aux victimes.
- On a également indiqué qu’un préavis plus long d’une prochaine audience de mise en liberté conditionnelle permettrait aux victimes de mieux se préparer à participer ou à présenter des déclarations à l’audience (« trois semaines, ce n’est pas assez »).
- Les participants ont fait remarquer que, à l’heure actuelle, certaines catégories de victimes ne peuvent pas participer au processus de libération conditionnelle. Les enfants et les adolescents, par exemple, sont des victimes qui doivent être entendues.
Information relative au processus de mise en liberté sous condition
Enfin, durant cette séance, les participants ont fait état des obstacles à la communication de l’information et des décisions sur le processus de mise en liberté sous condition. Les voici :
- Les termes trop compliqués du système de justice pénale nuisent à la compréhension de l’information sur le processus de mise en liberté sous condition.
- Selon un participant, il faut accroître la reddition de comptes et l’information fournie aux victimes quand les délinquants sont libérés dans la collectivité.
- Les participants ont souligné que le processus d’audience de libération conditionnelle peut être très traumatisant pour les victimes, et qu’il peut être très difficile de se rappeler des détails. On a proposé de permettre aux victimes d’avoir accès aux enregistrements sonores lorsqu’elles se sont présentées à une audience. Puisque cette possibilité est offerte aux victimes qui ne peuvent pas se présenter à l’audience, on a supposé que cela serait faisable.
- Les intervenants ont soulevé une foule de questions et de préoccupations à propos de la formation des commissaires. Il faudrait, à leur avis, fournir aux victimes plus de renseignements sur la formation des commissaires. En outre, il a été proposé de fournir de l’information aux commissaires sur les besoins des victimes et de leur dispenser une formation de sensibilisation à cette question (p. ex., présentation par une victime pendant la formation des commissaires).
- Les victimes qui vivent à l’étranger devraient elles aussi avoir accès aux renseignements sur les délinquants qui leur ont causé un préjudice.
- Un intervenant a fait remarquer que les victimes sont bouleversées lorsqu’elles apprennent que la décision de libérer un délinquant a été prise très rapidement. Cela pourrait les amener à penser que les commissaires n’ont pas beaucoup réfléchi à leurs décisions et/ou que les déclarations de la victime n’ont pas été examinées attentivement.
- Par ailleurs, il a été proposé de rendre les décisions en présence des victimes lorsqu’elles se sont présentées à l’audience ou qu’elles y ont présenté une déclaration. En outre, les motifs de la décision devraient être mieux expliqués aux victimes.
En plus des commentaires ci-dessus, plusieurs observations générales ont été faites :
- Le traumatisme historique des victimes et des délinquants autochtones, particulièrement celui de la victime, n’est pas reconnu par le système de justice pénale, et ce système ne tient pas compte de la décision Gladue.
- Un plus grand soutien gouvernemental pour les victimes est nécessaire, ce qui réduirait le recours excessif aux organisations non gouvernementales pour fournir le soutien aux victimes.
- Il a été suggéré d’accroître le soutien communautaire pour les délinquants qui sont libérés des établissements correctionnels pour assurer la sécurité du public et pour réduire le risque de victimisation future.
Séance 2 : La Charte canadienne des droits des victimes et le droit de participation
La Charte canadienne des droits des victimes (CCDV), qui est entrée en vigueur le 23 juillet 2015, a mis en place les droits suivants des victimes :
- le droit à l’information;
- le droit à la protection;
- le droit de participation;
- le droit de demander un dédommagement.
Dans le cadre du plan de mise en œuvre de la Charte, le BNVAC, après consultation de ses partenaires du portefeuille, a entamé un dialogue avec des intervenants non gouvernementaux des quatre coins du pays à l’occasion d’une série de tables rondes sur les droits des victimes dans le contexte des services correctionnels fédéraux et de la mise en liberté sous condition. Le 9 février et 19 juillet 2016, le BNVAC a tenu sa première table ronde sous le thème du « droit à l’information » avec des intervenants auprès des victimes et des organisations non gouvernementales.
La table ronde de 2017 a eu lieu à Ottawa, en Ontario. Elle portait sur les services correctionnels fédéraux et le « droit à la participation ». La séance de l’après-midi a été consacrée à trois thèmes fondamentaux du droit de participation : les besoins en matière de participation, le format et le mode de participation, et l’élimination des obstacles à la participation. Les participants ont formé quatre sous‑groupes pour augmenter au maximum leurs chances de fournir des commentaires sur ces thèmes.
Ce que nous avons entendu sur le droit de participation
Les participants ont évoqué plusieurs problèmes entourant leur besoin de participer. Les améliorations proposées fournies portaient sur les façons de mieux communiquer l’information pour encourager la participation aux décisions de l’établissement qui ont également une incidence sur les victimes, ainsi que sur les besoins de participation des victimes au processus de mise en liberté sous condition. De plus, des intervenants ont indiqué qu’il fallait améliorer la communication sur la façon dont ils peuvent participer au processus correctionnel et de mise en liberté sous condition.
Savoir comment participer
- Selon les intervenants, les victimes ne savent pas trop comment participer au système de justice pénale ni à qui s’adresser parce qu’il y a trois « filières » différentes de services aux victimes (BNVAC, SCC et CLCC). Les victimes ne peuvent pas exercer leur droit de participation si elles ne savent pas comment le système fonctionne. Un accroissement de l’éducation publique et de la sensibilisation aiderait les victimes à mieux comprendre les services correctionnels et la mise en liberté sous condition.
- On a également souligné que de nombreuses victimes ne sont pas au courant du processus d’inscription ni de son fonctionnement. Résultat, elles manquent des occasions de participer au processus décisionnel sur la mise en liberté sous condition.
- Il a été proposé de créer une trousse d’orientation unique et complète à l’intention des victimes confrontées au système de justice pénale. Cette trousse fournirait de l’information pour les accompagner tout au long du processus. On a mentionné qu’il existe une trousse dans l’Est canadien qui pourrait servir de modèle. Elle explique le système et le jargon juridique en termes simples.
Décisions prises à l’établissement
- On a signalé que les décisions prises par le directeur de l’établissement sont communiquées aux victimes, mais que les raisons justifiant ces décisions (par exemple, les permissions de sortir avec escorte) ne le sont pas. Ainsi les victimes pensent que le SCC ne se soucie pas de leur sécurité et de leurs préoccupations.
- De plus, les décisions relatives au niveau de sécurité de l’établissement du délinquant ne sont pas expliquées aux victimes. Cela peut être très difficile à accepter pour certaines victimes, notamment les victimes et les survivants de délinquants reconnus coupables de conduite avec facultés affaiblies. Ces délinquants sont souvent placés dans des établissements à sécurité minimale puisqu’on considère qu’ils ne présentent pas un risque de sécurité élevé, et qu’il s’agit souvent d’une première infraction. Cela dit, il se peut que les victimes qui ont perdu un être cher en raison d’une infraction de conduite avec facultés affaiblies considèrent ce type d’infraction comme un homicide et, ainsi, considèrent que le placement dans un établissement à sécurité minimale est inapproprié, sans explication suffisante.
- Pour résoudre les deux problèmes précités, des intervenants ont proposé qu’on fournisse aux victimes un résumé du processus décisionnel, comme les résumés des décisions sur la libération conditionnelle produits par la CLCC, pour que les victimes puissent mieux comprendre les facteurs impliqués dans le processus décisionnel en établissement et pour leur faire savoir que leurs préoccupations sont prises en considération.
- Selon les intervenants, il serait également utile que le SCC fasse connaître les changements apportés aux programmes correctionnels des délinquants plus longtemps à l’avance. L’absence de préavis peut engendrer un manque de confiance à l’égard des décisions sur la libération, car les victimes ne croient peut-être pas que le comportement du délinquant a vraiment changé.
- Selon les participants, il serait bon que le SCC transmette aux victimes des renseignements supplémentaires sur le délinquant qui leur a causé un préjudice. Il s’agit par exemple des progrès accomplis par le délinquant sur la voie du « changement », des remords qu’il ressent, etc.
- On a également fait observer que le plan correctionnel était très difficile à comprendre, et qu’il faudrait fournir aux victimes un résumé simplifié de ce document.
Besoins de la participation au processus de mise en liberté sous condition
Les participants ont répété que les audiences de libération conditionnelle peuvent être très traumatisantes, ce qui signifie que la communication relative aux audiences est très importante. Les recommandations suivantes ont donc été faites :
- donner un plus long préavis, parce qu’il est très difficile pour les victimes de planifier et de se préparer aux audiences;
- inclure plus de détails dans le préavis – par exemple, si seul le mois de l’audience est indiqué, cela ne permet pas de se préparer adéquatement;
- informer immédiatement les victimes en cas d’annulation ou de changement de la date de l’audience.
- Les participants ont également souligné l’importance du soutien familial pendant les audiences de libération conditionnelle, particulièrement dans les collectivités autochtones.
- Les audiences de libération conditionnelle tenues dans les établissements sont problématiques, parce que cet environnement peut être très intimidant pour certaines victimes, notamment dans les cas d’agressions sexuelles ou de maltraitance d’enfants. Les intervenants ont indiqué que la vidéoconférence est une solution potentielle pour éliminer cet obstacle. On a affirmé que la possibilité de se présenter ou de participer à l’audience par vidéoconférence pourrait éviter aux victimes de subir un nouveau traumatisme, et leur permettrait d’avoir plusieurs personnes présentes pour les soutenir.
- Tenir compte des besoins financiers serait une façon d’augmenter la participation des victimes au processus de mise en liberté sous condition. On a cité à titre d’exemple les coûts de l’accès aux transcriptions des audiences de libération conditionnelle et le remboursement rapide des frais de déplacement pour les victimes qui se présentent aux audiences.
- Quelques intervenants ont également fait observer qu’avant, les victimes pouvaient être accompagnées aux audiences par un agent des services aux victimes du SCC, mais que cette permission a été annulée sans préavis. Ce changement cause des problèmes et de la confusion, car il n’a pas été annoncé.
Élimination des obstacles à la participation
Les intervenants ont relevé deux obstacles qui freinent la participation des victimes aux décisions relatives aux services correctionnels et à la mise en liberté sous condition : l’exclusion de certaines catégories de victimes et la qualité des services.
Exclusion de certaines catégories de victimes
Les participants ont fait part de préoccupations concernant l’exclusion de certaines catégories de victimes du processus correctionnel et de mise en liberté sous condition.
- On a signalé que la définition de victime entraîne l’exclusion de nombreuses victimes. Par exemple, la famille d’un délinquant est souvent une victime, puisque le crime commis par le délinquant a des répercussions sur sa vie. Par ailleurs, la « famille de la rue » ou la « famille choisie » ne sont pas automatiquement admissibles aux services aux victimes (p. ex., justice réparatrice).
- Le mot « victime » est porteur d’exclusion, car beaucoup de personnes ne s’identifient pas comme victimes. Le terme « survivant » a été proposé comme solution possible, de même que « personne touchée par le crime ou la violence ».
- On a fait remarquer que des options additionnelles pour la participation des Autochtones au processus correctionnel et de mise en liberté sous condition devraient être fournies. Parmi les exemples fournis, citons les cercles de détermination de la peine et les audiences tenues avec l’aide d’un Aîné – deux mesures axées à la fois sur le délinquant et sur la victime.
- Il a été noté que l’absence de services d’interprétation pendant les audiences de libération conditionnelle était problématique pour les victimes dont la langue maternelle n’est ni le français ni l’anglais (communautés autochtones).
- Un participant a expliqué que certaines personnes dans les collectivités autochtones ont plus de difficulté à s’exprimer oralement. Le fait d’avoir quelqu’un qui les aide à communiquer est donc essentiel pour leur participation aux audiences de libération conditionnelle.
- Un autre participant a souligné la nécessité d’inclure les différents points de vue dans le processus correctionnel et de mise en liberté sous condition. Par exemple, les enfants et les adolescents sont exclus.
- Il a aussi été noté que l’approche « universelle » du processus correctionnel et de mise en liberté sous condition ne permet pas d’obtenir la participation de groupes comme les LGBTQ2+. Les participants ont indiqué que des programmes particuliers sont nécessaires pour garantir la participation de toutes les victimes. Il a été suggéré que l’adaptation des programmes à la population LGBTQ2+ pourrait permettre d’accroître la participation.
- Enfin, on a fait remarquer que les victimes ayant un casier judiciaire (les travailleuses du sexe, par exemple) pourraient être découragées de participer au système de justice pénale. Il faudrait donc accorder une attention particulière pour faire en sorte que ces personnes ne soient pas stigmatisées si elles choisissent de participer et qu’elles bénéficient d’un soutien adéquat pour exercer leur droit de participation.
Qualité du service
Enfin, les participants ont réitéré l’importance d’avoir des choix et des options pour garantir une expérience positive, et d’avoir des services fournis par les établissements fédéraux pour encourager la participation des victimes au système correctionnel et de mise en liberté sous condition. Les voici :
- veiller à ce que l’information pertinente soit toujours communiquée à la victime (p. ex., la communication peut être manquée si c’est un colocataire qui répond au téléphone);
- s’assurer que les victimes sont bien informées de ce à quoi elles peuvent attendre du système de justice pénale. De cette façon, elles comprendront mieux le système de justice pénale et pourront gérer leurs attentes (c.-à-d., leur rôle dans le système, comment le délinquant purgera sa peine, les renseignements qu’elles recevront automatiquement et de manière discrétionnaire);
- régler les problèmes techniques liés au Portail des victimes pour s’assurer que les victimes sont bien informées et qu’elles ont accès à l’information;
- garantir l’uniformité des services fédéraux offerts aux victimes – cela pourrait inclure un seul et unique formulaire de plainte;
- veiller à ce que le personnel correctionnel fasse preuve de respect et de compassion envers les victimes afin de les encourager à participer au processus décisionnel relatif aux services correctionnels et à la mise en liberté sous condition;
- adopter un processus d’inscription simplifié (moins de renseignements demandés à l’inscription);
- s’assurer que les victimes ont directement accès aux services. Par exemple, le fait de devoir laisser un message vocal pour recevoir un appel et l’information demandée est un obstacle qui nuit à la prestation d’un service adéquat. Certains intervenants ont indiqué qu’il est difficile d’obtenir des réponses du SCC et de la CLCC.
Aller de l’avant pour comprendre les besoins des victimes dans le processus correctionnel et de mise en liberté sous condition
À l’issue de la table ronde, Sécurité publique Canada s’est engagé à organiser une table ronde l’année suivante sous le thème du « droit à la protection ». Il a précisé que les recommandations formulées pendant la présente séance seraient étudiées et prises en considération.
On a demandé aux participants si, à leur avis, il serait utile de mener un sondage auprès des victimes. Les opinions étaient partagées. Certains n’y voyaient pas d’utilité, puisqu’on ne pouvait pas garantir un résultat qui améliorerait les services aux victimes. D’autres par contre pensaient que le fait d’en savoir plus sur les besoins des victimes et la réceptivité du système pourrait induire un changement. Cela dit, les participants ont proposé plusieurs idées d’études visant à mieux comprendre les besoins des victimes dans le processus correctionnel et de mise en liberté sous condition. Les voici :
- évaluer les décisions du directeur d’établissement et la fréquence de l’application des restrictions géographiques visant à protéger les victimes;
- étudier la fréquence à laquelle les victimes soutiennent les décisions prises par la Commission;
- évaluer les communications des services aux victimes fédéraux pour déterminer si l’information fournie est claire et cohérente dans toutes les régions;
- étudier l’incidence de la participation sur les victimes qui doivent présenter une déclaration de la victime à plusieurs reprises pendant les audiences;
- en apprendre davantage sur les besoins des membres de la famille qui se présentent aux audiences de libération conditionnelle;
- examiner si les renseignements transmis aux victimes ont des effets positifs sur elles ou s’ils sont une source de traumatisme additionnel ou de nouvelle victimisation.
Notes
- 1
Les publications du BNVAC sont accessibles en ligne à l’adresse : https://www.securitepublique.gc.ca/cnt/cntrng-crm/crrctns/vcmt-ssstnc-fr.aspxx
- 2
Le programme Option-Vie a été créé en 1991 par le Service correctionnel du Canada afin de fournir des services de soutien aux détenus condamnés à perpétuité. Ce programme favorise la réadaptation des détenus et les prépare à leur retour dans la société après leur libération conditionnelle. Il fait appel à des ex-détenus qui ont réussi leur réinsertion sociale et qui agissent comme mentors auprès des délinquants qui viennent d’être libérés. Ce programme a remporté plusieurs prix pour avoir contribué à réduire le risque de récidive.
- 3
L’initiative des cercles de soutien et de responsabilité, qui s’inscrit dans la réinsertion sociale, est basée sur les principes de la justice réparatrice. Elle appuie les personnes qui ont purgé une peine pour infraction(s) sexuelle(s) dans leurs efforts de réinsertion sociale. La participation au programme est volontaire.
- Date de modification :