Rapport annuel concernant les engagements assortis de conditions : arrestations effectuées sans mandat
Du 24 décembre 2006 au 1er mars 2007
1. Introduction
En vertu du paragraphe 83.31(3) du Code criminel, le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile doit préparer et déposer un rapport annuel au Parlement sur l'application de l'article 83.3 du Code criminel, qui porte sur les engagements assortis de conditions. Le rapport doit comprendre les renseignements suivants :
- Le nombre d'arrestations effectuées sans mandat par application du paragraphe 83.3(4) et la durée de la détention de la personne dans chacun des cas;
- Le nombre de fois où une personne a été arrêtée sans mandat par application du paragraphe 83.3(4) et mise en liberté
- par un agent de la paix en vertu de l'alinéa 83.3(5)b) ou
- par un juge en vertu de l'alinéa 83.3 (7)a).
Le ministre responsable des services de police de chaque province doit également publier, ou mettre à la disposition du public de toute autre façon, un rapport annuel sur l'application de cette disposition. Les rapports provinciaux ne sont pas inclus dans le présent document Note de bas de page 1.
Au moment de sa création, en 2001, la disposition relative à l'engagement assorti de conditions (de même que la disposition relative à l'audience d'investigation) était visée par une clause de temporisation de cinq ans selon laquelle la mesure cesserait de s'appliquer à la fin du quinzième jour de séance du Parlement après le 31 décembre 2006, à moins qu'une résolution visant à proroger la disposition soit adoptée par les deux Chambres du Parlement. En février 2007, la Chambre des communes a voté contre la prorogation de ces dispositions. Par conséquent, elles ont cessé de s'appliquer à la fin de la journée du 1er mars 2007. Cependant, cela n'a aucune incidence sur l'exigence relative à la présentation d'un rapport annuel.
Le présent document constitue le rapport annuel du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile. Il couvre la sixième année de l'application de la Loi anti-terroriste (LA), à savoir du 24 décembre 2006 au 1er mars 2007, période pendant laquelle cette mesure était prévue dans le Code criminel.
2. La Loi antiterroriste et les engagements assortis de conditions
Au lendemain des attentats terroristes du 11 septembre 2001 aux États-Unis, le Canada n'a pas tardé à mettre en place une approche complète vis-à-vis de la lutte contre le terrorisme. Un des éléments clé de cette approche était l'adoption du projet de loi C-36, le 15 octobre 2001. La LA a reçu la sanction royale le 18 décembre 2001.
La LA traitait des objectifs de l'approche du Canada vis-à-vis de la lutte contre le terrorisme, notamment empêcher les terroristes d'entrer au Canada, protéger les Canadiens contre les actes de terrorisme en mettant en application des outils permettant d'identifier, de poursuivre en justice, de condamner et de punir les terroristes et de collaborer avec la communauté internationale pour traduire les terroristes en justice et s'attaquer aux causes profondes du terrorisme. La Loi a permis de modifier de nombreuses lois fédérales et d'introduire plusieurs nouvelles mesures de lutte contre le terrorisme dans le Code criminel.
Disposition relative à l'engagement assorti de conditions
L'article 83.3 du Code criminel établissait de nouvelles mesures de prévention du terrorisme. L'agent de la paix pouvait déposer une dénonciation devant un juge de la cour provinciale s'il avait à la fois il avait des motifs raisonnables de croire qu'une activité terroriste allait être mise à exécution et de soupçonner que l'imposition, à une personne, d'un engagement assorti de conditions ou son arrestation était nécessaire pour éviter la mise à exécution de l'activité terroriste. Le juge pouvait ensuite faire comparaître la personne devant lui. Dans un nombre limité de situations, l'agent de la paix, s'il avait des motifs raisonnables de soupçonner que la mise sous garde de la personne était nécessaire afin de l'empêcher de mettre à exécution une activité terroriste, pouvait, sans mandat, arrêter la personne en vue de la conduire devant un juge. Le juge, s'il était convaincu par la preuve apportée que les soupçons de l'agent de la paix étaient fondés sur des motifs raisonnables, pouvait ordonner que la personne contracte l'engagement de ne pas troubler l'ordre public et qu'elle se conforme aux autres conditions raisonnables énoncées dans l'engagement que le juge estimait souhaitables pour prévenir la mise à exécution d'une activité terroriste. L'engagement était en vigueur pour une période maximale de douze mois.
Les dispositions relatives à l'engagement assorti de conditions prévoyaient notamment les mesures de protection suivantes :
- L'agent de la paix pouvait déposer la dénonciation devant un juge de la cour provinciale seulement s'il avait obtenu le consentement préalable du procureur général du Canada ou de son substitut légitime, ou du procureur général d'une province ou du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile ou de son substitut légitime.
- Le fait d'exiger que la personne ait des motifs raisonnables de croire qu'un acte terroriste allait être commis donnait de l'objectivité au critère. Autrement dit, le critère n'exigeait pas uniquement un doute raisonnable.
- Seul le juge d'une cour provinciale pouvait recevoir la dénonciation et faire comparaître la personne devant lui. Le juge qui recevait la dénonciation avait donc un pouvoir discrétionnaire de ne pas engager de procédure lorsque la dénonciation était sans fondement. De plus, le juge pouvait décider d'engager une procédure par voie de sommation plutôt que d'émettre un mandat d'arrestation dans le cas où l'arrestation de la personne aurait été excessive et injustifiée.
- L'arrestation sans mandat ne pouvait être effectuée que dans des circonstances limitées : soit lorsque l'urgence de la situation rendait difficilement réalisable le dépôt d'une dénonciation, ou soit lorsqu'une dénonciation avait été déposée et une sommation décernée, et l'agent de la paix avait des motifs raisonnables de croire que la mise sous garde de la personne était nécessaire afin de l'empêcher de mettre à exécution un acte terroriste.
- La personne mise sous garde devait être conduite devant un juge de la cour provinciale sans retard injustifié et dans un délai de vingt-quatre heures après son arrestation, mais si le juge n'était pas disponible dans ce délai, elle était conduite devant un juge de ce tribunal le plus tôt possible. Si une dénonciation n'avait pas été déposée avec le consentement du procureur général concerné avant la comparution de la personne mise sous garde devant le juge, celle-ci devait être mise en liberté.
- Lorsque la personne était mise sous garde et comparaissait devant le juge, il incombait à l'agent de la paix d'établir les motifs pour lesquels celle-ci devait demeurer sous garde.
- Le juge pouvait ordonner la détention de la personne jusqu'à l'audience, mais cette détention ne devait pas excéder 48 heures.
- À l'audience, le juge qui présidait devait être convaincu par la « preuve » apportée que les soupçons de l'agent de la paix étaient fondés sur des motifs raisonnables. Le juge était tenu de tirer ses propres conclusions quant à la probabilité que l'imposition, à une personne, d'un engagement assorti de conditions ou son arrestation était nécessaire pour éviter la mise à exécution de l'activité terroriste.
- Les dispositions relatives à l'engagement assorti de conditions étaient visées par une clause de temporisation de cinq ans. Leur application ne pouvait être prorogée que par une résolution adoptée par les deux chambres du Parlement.
En vertu du paragraphe 83.31(3), le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile doit présenter un rapport annuel au Parlement sur l'application du pouvoir d'arrestation sans mandat, tel que précisé dans l'introduction.
Le paragraphe 83.31(4) prévoit que ces rapports annuels ne doivent pas contenir de renseignements dont la divulgation pourrait compromettre ou miner une investigation en cours relativement à une infraction au titre d'une loi du Parlement. Les rapports ne doivent pas non plus divulguer des renseignements qui mettraient en péril la vie ou la sécurité d'une personne, qui porteraient atteinte à des procédures judiciaires ou qui iraient à l'encontre de l'intérêt public.
L'article 83.32 contient une clause de temporisation en vertu de laquelle ces pouvoirs ont cessé de s'appliquer à la fin du quinzième jour de séance du Parlement après le 31 décembre 2006, à moins que l'application des articles pertinents n'ait été prorogée conformément à la procédure prévue aux paragraphes 83.32(2) à (5). Comme il a déjà été mentionné, en février 2007, la Chambre des communes a voté contre la prorogation de ces mesures, faisant en sorte qu'elles cessent de s'appliquer à la fin de la journée du 1er mars 2007.
f3. Statistiques
Alinéa 83.31(3)a)
Le nombre d'arrestations effectuées sans mandat par application du paragraphe 83.3(4) et la durée de la détention de la personne dans chacun des cas;
Alinéa 83.31(3)b)
Le nombre de fois où une personne a été arrêtée sans mandat par application du paragraphe 83.3(4) et mise en liberté
- par un agent de la paix en vertu du sous-alinéa 83.3(5)b) ou
- par un juge en vertu du sous-alinéa 83.3 (7)a).
Pour la période du 24 décembre 2006 au 1er mars 2007, la Gendarmerie royale du Canada a déclaré qu'aucune arrestation sans mandat n'avait été effectuée par application du paragraphe 83.3(4) du Code criminel. Par conséquent, il n'y a aucune donnée à rapporter sur la durée de la détention des personnes arrêtées.
Étant donné qu'aucune arrestation n'a été effectuée sans mandat par application du paragraphe 83.3 (4), il n'y a pas non plus de données à rapporter en vertu du sous-alinéa 83.31(3)b). Cette information a été confirmée par la Gendarmerie royale du Canada.
Les cinq premiers rapports annuels préparés par le ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile ont été présentés au Parlement. Entre le 24 décembre 2001 et le 23 décembre 2006, la Gendarmerie royale du Canada ne disposait d'aucune donnée ayant trait à l'exigence relative à la présentation de rapports. Ces cinq rapports peuvent être consultés ou téléchargés en ligne sur le site Web de la Sécurité publique.
4. Évaluation
Les dispositions de la LA visaient à doter les policiers et les poursuivants d'outils leur permettant de mieux cerner les menaces terroristes et de mener des enquêtes et des poursuites plus efficaces au sujet des activités terroristes.
La possibilité de sauver des vies grâce à l'engagement assorti de conditions était réelle. Elle donnait aux organismes d'application de la loi la capacité essentielle d'agir rapidement, lorsque les circonstances le justifient. Ce pouvoir pouvait être utilisé pour prévenir, interrompre et dissuader l'activité terroriste. Contrairement à d'autres mesures prévues dans le Code criminel, ce pouvoir était adapté à la nature de la structure terroriste et au type d'activités.
Le fait qu'aucune arrestation n'ait été effectuée en vertu du paragraphe 83.3 (4) du Code criminel depuis l'entrée en vigueur de la LA, il y a cinq ans et deux mois, indique que les services de police considéraient le pouvoir d'arrestation sans mandat de l'article 83.3 uniquement comme une mesure de prévention. Cela indique également que les organismes d'application de la loi ne prenaient pas à la légère les pouvoirs soigneusement définis qui leur avait été conférés par le Parlement et qu'ils étaient sensibles aux répercussions de l'application de ces pouvoirs.
Dans l'ensemble, les dispositions réalisaient leur dessein initial : elles assuraient la protection des Canadiens et de la collectivité mondiale tout en respectant les droits de la personne et en protégeant les libertés civiles.
Examen de la Loi anti-terroriste
La Loi exigeait que le Parlement effectue un examen approfondi des dispositions et de l'application de la Loi anti-terroriste dans les trois ans qui suivaient sa sanction (18 décembre 2001). L'examen a été effectué au début de l'année 2007 par deux comités parlementaires, soit le Comité spécial du Sénat sur la Loi anti-terroriste et le Sous-comité de la Chambre des communes de l'examen de la Loi anti-terroriste, un sous-comité du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Le Comité spécial a demandé que l'application des dispositions relatives à l'audience d'investigation et à l'engagement assorti de conditions soit prolongée pour une période de trois ans et qu'elle puisse être prolongée de nouveau. Il recommandait également que les rapports annuels sur l'application de ces mesures comportent un énoncé clair et une explication du procureur général du Canada indiquant si ces mesures demeuraient justifiées. La majorité des membres du Sous-comité de la Chambre ont recommandé que les audiences d'investigation ne s'appliquent qu'aux infractions de terrorisme imminentes – et non aux infractions déjà commises – et que les dispositions relatives à l'audience d'investigation et à l'engagement assorti de conditions soient prorogées de cinq ans, sous réserve d'un examen parlementaire obligatoire, et qu'elles puissent être prorogées de nouveau. Cependant, une opinion dissidente a été soulevée à l'effet que l'engagement assorti de conditions devrait être aboli.
Le 27 février 2007, la Chambre des communes a défait, à 154 voix contre 129, une motion visant à prolonger de trois ans l'application des dispositions relatives à l'audience d'investigation et à l'engagement assorti de conditions. Par conséquent, ces dispositions ont cessé de s'appliquer le 1er mars 2007.
Le gouvernement demeure déterminé à fournir aux organismes d'application de la loi les pouvoirs nécessaires pour s'attaquer au terrorisme.
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Pour les besoins du présent rapport, les données qu'il contient comprennent les exigences relatives à la présentation de rapports pour le Yukon, les Territoires-du-Nord-Ouest et le Nunavut.
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