Échelles de prévision brève du risque de récidive chez les délinquants sexuels

Échelles de prévision brève du risque de récidive chez les délinquants sexuels

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Vol. 4 No. 5
Novembre 1999

Question

Avec quelle exactitude les échelles de prévision brève et structurée du risque permettent-elles de prévoir la récidive chez les délinquants sexuels?

Contexte

Les infractions sexuelles suscitent des inquiétudes importantes au sein du public. Des politiques spéciales ont été élaborées dans le but de protéger le public contre les délinquants sexuels à risque élevé, donnant notamment lieu à l'imposition de programmes de traitement intensif, de mesures de restriction de la liberté conditionnelle et de surveillance de longue durée dans la collectivité. Toutes ces politiques supposent que l'on puisse faire la distinction entre les délinquants à faible risque et les délinquants à risque élevé.

Jusqu'ici, le recours au jugement clinique non structuré n'a permis qu'avec peu d'exactitude de prévoir quels délinquants sexuels allaient récidiver. Les échelles de prévision du risque conçues pour évaluer le risque de récidive des auteurs d'infractions criminelles non sexuelles ne fournissaient que peu d'indications par rapport à la récidive sexuelle. Par conséquent, il était devenu nécessaire de disposer d'une échelle conçue spécialement pour prédire le risque de récidive chez les délinquants sexuels.

Méthode

L'étude a eu pour objet d'examiner l'exactitude de prévision d'une échelle actuarielle de prévision brève du risque intitulée Statique-99. Cette échelle, issue de la combinaison de deux échelles existantes (l'Évaluation rapide du risque de récidive sexuelle, et le Jugement clinique ancré et structuré mis au point par Thornton), tient compte des éléments suivants : infractions sexuelles antérieures, victimes sans lien de parenté avec le délinquant, victimes qui sont des inconnus, victimes du sexe masculin, âge, jamais marié, infractions sexuelles sans contact, au moins quatre prononcés de sentence antérieurs, infraction de violence non sexuelle à l'origine de la peine actuelle, et infraction de violence non sexuelle antérieure.

L'échelle a été mise à l'essai auprès de quatre échantillons de délinquants sexuels provenant d'établissements psychiatriques fermés au Québec (n = 344) et en Ontario (n = 142), d'une prison provinciale située en Ontario (n = 191) et du Her Majesty's Prison Service (Angleterre et pays de Galles) (n = 531). Les renseignements sur la récidive ont été tirés des dossiers tenus par la police nationale, sauf dans le cas d'un échantillon pour lequel l'information utilisée a été tirée des dossiers de la police et des hôpitaux. Pour la plupart des délinquants, la période de suivi était supérieure à 15 ans.

Réponse

La moyenne des taux de récidive obtenus pour les différents échantillons combinés s'établissait, après 15 ans, à 26 % pour les infractions sexuelles et à 37 % pour toute infraction avec violence (y compris sexuelle). L'exactitude de prévision de l'échelle Statique-99 s'est révélée modérée tant pour la récidive sexuelle que pour la récidive avec violence. Après un suivi de 15 ans, le taux de récidive sexuelle du groupe classé dans la catégorie à faible risque s'élevait à environ 10 %, tandis que celui du groupe dit à risque élevé était supérieur à 50 %. Le taux de récidive pour toute infraction avec violence était de 17 % après 15 ans pour les délinquants à faible risque, tandis qu'il s'établissait à 59 % pour le groupe à risque élevé.

Le degré d'exactitude de prévision s'est avéré semblable pour les quatre échantillons, la variation n'étant pas plus grande que celle qu'on aurait pu attribuer au hasard. De même, l'échelle a été aussi exacte pour les auteurs d'infractions à l'endroit d'enfants (agresseurs d'enfants) que pour ceux qui s'en étaient pris à des adultes (violeurs).

Incidences sur les politiques

  1. Les échelles de prévision du risque structurées permettent de prévoir de manière suffisamment exacte la récidive sexuelle pour être utilisées dans des contextes pratiques. L'exactitude de prévision est loin d'être parfaite, mais elle est manifestement supérieure à celle d'autres méthodes communément utilisées pour évaluer le risque que présentent les délinquants sexuels (p. ex. le jugement clinique non structuré).
  2. La capacité de ces instruments de faire la distinction entre les délinquants sexuels selon qu'ils présentent un faible risque ou un risque élevé de récidive est suffisante pour qu'on s'appuie sur eux dans la mise en ouvre de politiques spéciales visant les délinquants à risque élevé (p. ex. les déclarations de délinquant à contrôler, les programmes de traitement intensif).
  3. La plupart des délinquants sexuels ne sont pas jamais déclarés coupables d'une nouvelle infraction sexuelle, et les délinquants à faible risque peuvent faire l'objet d'interventions d'intensité moindre (p. ex. la probation) sans que cela compromette la sécurité du public.

Source

Pour de plus amples renseignements

James Bonta, Ph.D.
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