Notes des comités parlementaires : Ingérence étrangère

Engagements :

Réponse proposée :

Message global au sujet des progrès et des priorités

Protéger les institutions démocratiques du Canada contre l’ingérence étrangère et la désinformation

Proposer des mesures visant à lutter contre la montée de l’extrémisme violent à caractère idéologique

Accroître les ressources en vue de promouvoir la sécurité économique et de lutter contre l’ingérence étrangère

Accroître la collaboration et l’échange d’information et de renseignements avec les partenaires canadiens et tous les autres ordres de gouvernement pour atténuer les risques liés à la sécurité dans les partenariats de recherche et d’investissement étrangers

Une partie des consultations publiques sur d’éventuelles modifications législatives portait sur la modification de la Loi sur le SCRS pour autoriser le SCRS à communiquer de l’information à des entités à l’extérieur du gouvernement du Canada. Cette mesure a pour but d’aider à accroître la résilience face aux menaces, telles que l’ingérence étrangère, et à améliorer la trousse à outils du Canada pour lutter contre cette dernière.

Sécurité publique Canada renforce la sécurité de la recherche à l’échelle du pays et a mis sur pied le Centre de la sécurité de la recherche qui a pour mandat de fournir des conseils et des directives directement aux chercheurs et aux universités du Canada, d’effectuer les examens de sécurité conformément aux Lignes directrices en matière de sécurité nationale pour les partenariats de recherche, et d’établir une politique sur la sécurité de la recherche.

Contexte

Ingérence étrangère

L’ingérence étrangère (IE) s’entend des activités clandestines ou trompeuses, ou qui comportent des menaces envers quiconque, menées par des acteurs étatiques ou non étatiques et qui nuisent aux intérêts du Canada. Parmi les techniques utilisées pour mener de telles activités, il y a l’espionnage, le sabotage, le financement illégal et la corruption, ainsi que toute autre activité de menace. Les États étrangers misent sur ces activités pour promouvoir leurs intérêts stratégiques, notamment assurer leur stabilité intérieure, influer sur le plan géopolitique, obtenir un avantage économique, ébranler l’ordre international fondé sur des règles et faire des gains militaires. Ces activités, qui peuvent être dirigées contre des Canadiens, des résidents du Canada ou des institutions canadiennes, visent à promouvoir les intérêts stratégiques d’États étrangers au détriment de nos intérêts et de nos valeurs.

Dans le cadre de son mandat de faire enquête sur les menaces à la sécurité du Canada, notamment l’ingérence étrangère, le SCRS a été témoin de nombreux cas où des États étrangers ont ciblé des institutions ou des collectivités canadiennes. Quant à GRC, elle sait que des activités illégales commandées par des États sont menées contre la population et les intérêts du Canada, et enquête sur ces activités dans le cadre de son mandat.

Plusieurs rapports font état de la menace d’IE qui pèse sur le Canada. Par exemple, le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) affirme dans son rapport public de 2021 que les activités d’IE menées au pays demeurent complexes, omniprésentes et incessantes. Les activités d’espionnage et les activités influencées par l’étranger visent des entités canadiennes, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, et menacent directement la sécurité nationale et les intérêts stratégiques du Canada. Dans son rapport public de 2022, le SCRS donne des exemples de méthodes employées par les États étrangers, comme répandre clandestinement de la mésinformation et de la désinformation ou encore surveiller, intimider et harceler des communautés canadiennes. Antérieurement, le Rapport annuel 2019 du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement (CPSNR) avait décrit certaines activités d’IE, dont le ciblage d’institutions canadiennes par des auteurs de menaces. Ce rapport du CPSNR souligne que la Chine et la Russie sont particulièrement actives au Canada et contient des recommandations pour améliorer la réponse nationale à la menace d’IE.

Alors que le tableau de menace évolue, le Canada consolide les mesures déjà en place, en plus de garnir sa boîte à outils et son cadre législatif. Conscient du tableau, le gouvernement fédéral a annoncé au printemps de 2023 une série de nouvelles mesures pour combattre l’IE :

Sécurité publique Canada (SP) a d’ailleurs lancé le 23 novembre 2023, en partenariat avec le SCRS et le ministère de la Justice (JUS), des consultations publiques au sujet de la Loi sur le SCRS, du Code criminel, de la Loi sur la protection de l’information et de la Loi sur la preuve au Canada. Celles-ci ont pour but d’éventuellement :

Des menaces envers la démocratie

Le Canada observe des campagnes d’information parrainées par des États, qui visent à miner ou refaçonner l’ordre international fondé sur des règles. La désinformation, peu importe son origine, peut avoir de graves conséquences, notamment menacer la sécurité de la population canadienne, éroder la confiance en nos institutions démocratiques et semer la confusion quant aux politiques et aux avis du gouvernement.

Bien que le système électoral du Canada soit robuste, des auteurs de menaces prennent pour cibles ses personnages et partis politiques, ses élections et ses médias afin de manipuler le public et d’ébranler sa démocratie.

Pour sensibiliser la population à ces menaces et renforcer les pratiques de sécurité, le SCRS donne des séances d’information sur les activités hostiles des acteurs étatiques. La communication de renseignement et d’évaluations du SCRS aux instances supérieures permet de prendre des décisions éclairées lorsqu’il s’agit de contrer ces menaces et d’élaborer des politiques à cet égard. De même, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) dispose d’un mandat étendu aux facettes multiples pour enquêter sur l’IE, la prévenir et l’enrayer en s’appuyant sur diverses lois.

La manipulation de l’information fait l’objet d’une collaboration internationale sur diverses tribunes bilatérales et multilatérales. Par exemple, vous représentez chaque année le Canada à la Réunion des ministres des cinq pays, où les ministres de la sécurité du Groupe des cinq collaborent, se concertent et échangent des renseignements sur diverses questions de sécurité nationale, dont la lutte contre l’ingérence étrangère.

L’enquête publique sur l’ingérence étrangère

Le 7 septembre 2023, vous avez annoncé l’ouverture de l’Enquête publique sur l’ingérence étrangère dans les processus électoraux et les institutions démocratiques fédéraux. Celle‑ci est dirigée par l’hon. Marie-Josée Hogue, juge puînée de la Cour d’appel du Québec, qui a assumé ses fonctions de commissaire le 18 septembre 2023. La juge Hogue est chargée d’examiner et d’évaluer l’ingérence de la Chine, de la Russie, d’autres États et des acteurs non étatiques avec ses conséquences possibles, afin d’évaluer l’intégrité et la compromission éventuelle des 43e et 44e élections générales fédérales, à l’échelle nationale comme au niveau des circonscriptions.

La commissaire doit déposer un rapport provisoire le 3 mai 2024 et un rapport final au plus tard en décembre de la même année. S’il y a lieu, elle peut déposer séparément un rapport classifié contenant tout ce qui ne peut pas figurer dans le rapport public.

L’extrémisme violent à caractère idéologique

Le gouvernement fédéral fonde ses efforts dans la lutte au terrorisme et à l’extrémisme violent (EV) sur la stratégie antiterroriste de 2012 et ses quatre piliers : empêcher, déceler, priver et intervenir. En 2019, il a défini trois catégories d’EV, lesquelles sont larges et ne s’excluent pas les unes les autres : les extrémismes violents à caractère religieux (EVCR), politique (EVCP) et idéologique (EVCI). Le dernier se subdivise à son tour selon le SCRS en les idéologies axées sur la xénophobie, le genre, l’opposition à l’autorité et les autres motifs de violence fondés sur des récriminations personnelles.

Les attentats inspirés par la rhétorique de l’EVCI montrent une hausse fulgurante depuis 2014 dans le monde entier. Parmi les attentats perpétrés en sol canadien qu’on peut attribuer en partie ou en totalité à l’EVCI, on peut citer la fusillade de 2014 à Moncton, celle de 2017 à la mosquée de Québec, et l’attaque au camion‑bélier de 2018 à Toronto. Le 6 juin 2023, la Cour supérieure de l’Ontario a statué que le meurtre de février 2020 dans un salon de massage de Toronto constituait bien un acte terroriste au sens du Code criminel. Cela ne signifie pas qu’un chef de terrorisme sera ajouté aux accusations; par contre, la peine, qui reste à déterminer, s’en ressentira. Il s’agit de la première accusation de terrorisme jamais portée et du premier verdict jamais rendu contre un extrémiste à motivation idéologique, à plus forte raison contre un adhérent au mouvement dit des « célibataires involontaires » (incel). Puis le 16 novembre 2023, N. Veltman, l’homme qui avait tué quatre membres d’une famille musulmane et en avait blessé grièvement un cinquième en fonçant sur eux avec son véhicule à London (Ontario), a été déclaré coupable de meurtre au premier degré. Dans la détermination de la peine, la juge a statué que l’acte constituait du terrorisme au sens du droit canadien.

Dans la dernière année, la GRC s’est dotée d’une stratégie sur l’EVCI, laquelle expose les lacunes et autres difficultés que l’on rencontre dans le travail d’enquête pour identifier et déjouer les auteurs de menaces d’EVCI éventuels. Cette stratégie jette aussi les bases pour que la GRC puisse faire l’inventaire de ses propres outils et savoir où il lui faudrait plus de ressources pour enrayer les menaces efficacement.

Face à une inquiétante perte de cohésion sociale qui favorise la diffusion de désinformation et alimente la polarisation en même temps que le potentiel de radicalisation et d’extrémisme violent, SP, le SCRS, la GRC et JUS ont eu une série de rencontres avec les communautés juives, palestiniennes, arabes et musulmanes pour discuter de leur sécurité. Ces dernières disent craindre que de possibles préjugés et cas de mésinformation dans les médias et le discours public faussent à leur tour les perceptions du public et renforcent les stéréotypes négatifs à leur encontre, aiguisent les tensions et stigmatisent leurs membres, débouchant éventuellement sur de la violence haineuse.

Sécurité économique

L’intensification du commerce mondial et une innovation technologique rapide offrent au Canada d’immenses possibilités de croissance économique et de prospérité. D’importants domaines technologiques émergents sont devenus des moteurs essentiels de la croissance et du développement économiques. Toutefois, ces avancées donnent également lieu à de nouvelles et graves vulnérabilités en matière de sécurité nationale, qui se manifestent par toute une série de points d’entrée dans l’économie canadienne. Les technologies sensibles ayant des applications militaires ou bivalentes, les données personnelles sensibles des Canadiens et Canadiennes, et les infrastructures essentielles sont les principaux atouts qui font tourner notre économie et souvent les plus ciblées par les acteurs hostiles. Dans son allocution devant le Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale en février 2021 par exemple, le directeur du SCRS, David Vigneault, a indiqué que les secteurs canadiens de la biopharmacie, de la santé, de l’intelligence artificielle, de l’informatique quantique, des technologies océaniques et de l’aérospatiale étaient particulièrement menacés.

Les menaces peuvent prendre la forme d’investissements d’acteurs étrangers hostiles dans des secteurs et industries stratégiques déterminants pour la sécurité nationale; d’acquisitions de marchandises, de technologies et d’expertise sensibles; ou encore de partenariats de financement avec nos universités et centres de recherche pour bénéficier de technologies de pointe et des droits de propriété intellectuelle qui les accompagnent.

Le gouvernement fédéral dispose de tout un arsenal pour protéger l’économie et, plus généralement, les intérêts stratégiques du Canada. On peut penser entre autres au Programme des marchandises contrôlées, appliqué par Services publics et Approvisionnement Canada; à la Loi sur les licences d’exportation et d’importation, appliquée par Affaires mondiales Canada; et à la Loi sur Investissement Canada (LIC), qui est appliquée par le ministère de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique tandis que SP pilote, sous son régime, l’examen des investissements étrangers envisagés qui pourraient porter atteinte à la sécurité nationale.

Plusieurs partenaires du Canada en matière de sécurité, dont l’Australie, le Royaume-Uni et les États-Unis, ont renforcé leurs capacités afin de pouvoir cerner et atténuer plus facilement les risques économiques envers leur sécurité nationale. Pour sa part, le Canada cherche à faire fond sur le régime actuel pour protéger ses biens les plus précieux tout en maintenant l’ouverture et l’innovation qui sont essentielles à l’économie canadienne.

Échange d’information et sauvegarde de l’écosystème de la recherche

Centre de la sécurité de la recherche

Le budget de 2022 annonçait la création d’un centre de la sécurité de la recherche au sein de SP. Celui‑ci a trois responsabilités principales : 1) implanter et gérer les Lignes directrices sur la sécurité nationale pour les partenariats de recherche; 2) créer des outils et autres ressources sur la sécurité de la recherche, puis les distribuer dans le monde universitaire canadien; 3) donner des conseils sur mesure aux chercheurs et chercheuses et aux universitaires sur leurs travaux de recherche et la manière de les protéger.

Le Centre comprend une équipe de conseillers et conseillères régionaux répartis dans tout le pays, qui traitent directement avec les chercheurs et chercheuses et les universités. Il y a eu à ce jour plus de 300 échanges entre les uns et les autres.

Lignes directrices sur la sécurité nationale pour les partenariats de recherche

Le gouvernement fédéral a publié le 12 juillet 2021 les Lignes directrices sur la sécurité nationale pour les partenariats de recherche, qu’il avait élaborées en collaboration avec les universités en un groupe de travail mixte. Afin de protéger leur travail, on encourage tous les chercheurs et chercheuses à utiliser ces lignes directrices pour évaluer tous les partenariats de recherche, qui que soit le partenaire ou bailleur de fonds. La mise en œuvre des lignes directrices s’effectue par étapes, en commençant par les subventions Alliance du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie pour les demandes qui impliquent un partenaire du secteur privé. À l’automne 2023, le programme s’est élargi pour englober l’appel à la phase 2 du Fonds de recherche biomédicale du Canada et du Fonds d’infrastructure de recherche en sciences biologiques. Son expansion va se poursuivre au début de 2024.

Déclaration sur la sécurité de la recherche

Le 14 février 2023, les ministres respectifs de la Sécurité publique, de la Santé et de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie ont annoncé de nouveaux critères d’admissibilité aux subventions de recherche des organismes subventionnaires fédéraux et de la Fondation canadienne pour l’innovation. Une fois en vigueur, les nouvelles règles interdiront d’accorder des fonds si même un seul des chercheurs ou chercheuses a des liens avec une université, un institut de recherche ou un laboratoire (ou reçoit de celui‑ci du financement ou des contributions en nature) rattaché à l’armée, au ministère de la Défense ou à des organismes de sécurité d’États qui présentent une menace pour notre propre sécurité nationale.

Le 16 janvier 2024, les ministres ont publié des renseignements supplémentaires sur la mise en œuvre de la Politique sur la recherche en technologies sensibles et sur les affiliations préoccupantes. En application de celle‑ci, SP a dressé deux listes.

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