Notes des comités parlementaires : Sommaire de la deuxiéme lecture et de l’étude préliminaire par le SECU

Projet de loi C-70, Loi concernant la lutte contre l’ingérence étrangère

Objet

La présente note concerne le point de vue et la position des partis politiques fédéraux à l’égard du projet de loi C‑70, Loi concernant la lutte contre l’ingérence étrangère, tels qu’exprimés en deuxième lecture et pendant l’étude préliminaire au SECU, les 29 et 30 mai respectivement.

Contexte

Le 6 mai 2024, la Chambre des communes a reçu le projet de loi C‑70, Loi concernant la lutte contre l’ingérence étrangère. La deuxième lecture a débuté le 29 mai 2024; la motion a été discutée par tous les partis et débattue en Chambre, mais sans obtenir d’appui unanime. Une motion unanime de portée plus limitée a toutefois été renvoyée par la Chambre au SECU, qui à son tour procéderait à une étude préliminaire le 30 mai 2024. L’étude du C‑70 doit se poursuivre le lundi 3 juin 2024.

Points souleves par les partis

Un large éventail de députés ont participé aux séances sur le projet de loi, affirmant un appui très fort. Aux côtés des libéraux, les conservateurs, les néodémocrates et les bloquistes se sont tous montrés en faveur du projet de loi, moyennant des amendements à l’étape de l’étude en comité.

Les points généraux soulevés à répétition par les parlementaires en deuxième lecture sont : 1) que le Canada a besoin urgent de ce type de législation, et que le projet de loi devrait être adopté par la Chambre à temps pour les élections de 2025; 2) que des amendements s’imposent, notamment au regard de l’indépendance du poste de commissaire à la transparence et de l’impératif potentiel de resserrer les exigences d’enregistrement pour certains particuliers.

Les points généraux soulevés pendant l’étude préliminaire au SECU sont : si la loi à venir pourra être mise en œuvre avant les prochaines élections fédérales et quel sera le degré d’indépendance du nouveau poste de commissaire à la transparence; 2) la crainte qu’une telle loi ajoute à la victimation de certains particuliers; 4) si la législation existante est efficace et si la loi envisagée aurait effectivement permis d’éviter certains incidents passés; 5) le seuil pour exiger l’enregistrement.

Les débats en deuxième lecture et l’étude préliminaire au SECU sont résumés par partis politiques, avec certains recoupements.

Parti libéral du Canada (libéraux)

Pendant l’étude préliminaire du 30 mai 2024, les questions des députés libéraux ont été axées surtout sur les points suivants : 1) l’expansion des capacités en matière de mandats et les efforts du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) pour gagner la confiance des communautés minoritaires; 2) les mesures prises actuellement pour veiller au respect de la vie privée et s’assurer que les données soient fiables avant de s’en servir; 3) les craintes des communautés canadiennes et les efforts pour prévenir leur victimation; 4) les lacunes opérationnelles que visent à pallier les modifications à la Loi sur le SCRS; 5) les leçons apprises des lois semblables en vigueur dans des pays alliés; 6) le cadre réglementaire qui sous-tend le Registre pour la transparence en matière d’influence étrangère (« le Registre »); 7) l’examen parlementaire quinquennal; 8) les sanctions en cas de non‑conformité; 9) définir ce qui constitue des arrangements conclus entre une personne et des États étrangers, et en quoi consistent les activités de renseignement requises pour conclure à un lien avec une entité étrangère; 10) le premier procès en influence étrangère mené en Australie, sous le régime des lois australiennes en la matière.

Parti conservateur du Canada (PCC)

Le PCC se montre généralement favorable à ce genre de législation. Ainsi le 28 mai 2024, le député Michael Chong, critique conservateur en matière de politique étrangère, a envoyé au ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales une lettre ouverte exprimant son appui au projet de loi C‑70, dont voici un extrait.

À l’approche des élections générales, le temps presse pour renforcer la confiance des Canadiens dans nos élections. C’est pourquoi les conservateurs proposent de présenter une motion de consentement unanime à la fin du débat en deuxième lecture, qui, si elle est adoptée, permettra l’adoption rapide du projet de loi C‑70 à la Chambre des communes et en comité, ce qui laissera suffisamment de temps pour mettre en œuvre des mesures de protection contre l’ingérence étrangère avant les élections. Les conservateurs travailleront de bonne foi pour assurer l’avancement rapide du projet de loi C‑70 à la Chambre tout en garantissant un examen suffisant des mesures prévues par le projet de lot.

En deuxième lecture le 29 mai 2024, le député Chong a réaffirmé ce point de vue et souligné l’importance d’agir contre l’ingérence étrangère, rappelant les conclusions de l’Enquête publique sur l’ingérence étrangère (dirigée par la juge Hogue), qui illustrent l’ampleur de cette problématique au Canada.

Le PCC concentre ses critiques sur ce qu’il dénonce comme une lenteur du législateur à agir, malgré les conseils des spécialistes en renseignement et sécurité nationale.

Le PCC exprime un intérêt à revoir la définition du terme « infrastructure essentielle » dans la portion du projet de loi sur le Code criminel et suggère que les chefs de tous les partis puissent participer à la sélection du ou de la commissaire à la transparence (partie 4 du projet de loi). Enfin, il souhaiterait que la Chambre adopte le projet de loi en troisième lecture au plus tard le 12 juin 2024.

À l’étude préliminaire par le SECU, les questions du PCC ont porté surtout sur les points suivants : 1) les délais pour implanter le Registre une fois obtenue la sanction royale, y compris la question de savoir si le Registre sera en place à temps pour les prochaines élections; 2) si le fait de faire approuver la personne titulaire du nouveau poste de commissaire à la transparence par le Parlement, plutôt que de simplement consulter celui-ci, rendrait le poste en question plus indépendant; 3) les activités du bureau économique et commercial de Hong Kong au Canada; 4) si le SCRS devrait avoir besoin de l’accord du Ministre pour aviser les députés concernés des menaces pesant contre eux; 5) l’obligation de faire appel au procureur général pour les enquêtes sous le régime de la Loi sur la protection de l’information; 6) le délai d’un an et la nécessité d’un décret pour que le Registre entre en vigueur; 7) le seuil pour exiger l’enregistrement, au regard des sommes déboursées; 8) le processus consultatif pour les règlements; 9) la définition de « titulaire d’une charge publique », et le fait qu’elle n’inclue pas les personnes nommées par les cabinets provinciaux ni les membres de commissions ou autres organismes provinciaux; 10) si l’infraction de sabotage devrait comprendre la planification ou la construction d’infrastructures; 11) les mesures que l’on pourrait prendre pour protéger les opinions politiques de l’individu contre l’ingérence étrangère.

Bloc Québécois (le Bloc)

Bien qu’il fût largement en faveur de renvoyer le projet de loi en comité, le Bloc a aussi proposé en comité des améliorations, entre autres des amendements pour empêcher les anciens titulaires de charges publiques canadiens de travailler pour des gouvernements étrangers, ou encore exiger un double enregistrement.

Les questions du Bloc pendant l’étude préliminaire au SECU ont porté surtout sur les points suivants : 1) pourquoi le projet exige le « double enregistrement » au lieu de l’harmonisation; 2) les conséquences pour les particuliers qui ne s’enregistreraient pas; 3) si le Registre aurait permis d’éviter l’incident que l’on sait au Laboratoire national de microbiologie à Winnipeg; 4) le genre de profil que devrait avoir un ou une commissaire à la transparence; 5) comment assurer l’indépendance du ou de la commissaire à la transparence; 6) si l’on devrait obliger les universités à s’enregistrer.

Nouveau Parti démocratique (NPD)

Le NPD entend appuyer le projet de loi et se dit impatient de commencer l’étude préliminaire au SECU. Bien que son chef Jagmeet Singh affirme souhaiter que la Chambre des communes adopte le C‑70 rapidement, le NPD n’a pas appuyé la motion du PCC pour en accélérer l’adoption. Le député Alistair MacGregor fait remarquer que les dispositions de la Loi sur le SCRS sur les ensembles de données font suite à un rapport « assez dévastateur » de l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement (OSSNR) sur la manière dont le SCRS a géré des ensembles de données par le passé. Le même député fait également valoir que les personnes qui pratiquent l’influence étrangère malveillante, ou plus largement l’ingérence étrangère, sont peu susceptibles de s’inscrire à un éventuel registre. En réponse à quoi, le ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales a déclaré que la poursuite en justice des auteurs malveillants, la difficulté de convertir le renseignement en preuve et les sanctions pour qui ne se conformerait pas pourraient être autant de points à aborder au SECU.

Pendant l’étude préliminaire au SECU, le NPD a interrogé des témoins sur 1) dans quelle mesure le Canada, avec ses lois actuelles, arrive à intenter des poursuites et obtenir des déclarations de culpabilité; 2) ce qui constitue un « arrangement » au sens de la partie 4 et ce que cela signifie d’être « en association avec » un commettant étranger; 3) le rapport de l’OSSNR concernant le régime du SCRS pour les ensembles de données et les mécanismes pour réprimer la non-conformité à la Loi sur le SCRS; 4) l’harmonisation des définitions entre les diverses lois visées par le C‑70.

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