Programme d’échange de seringues dans les prisons
Date : 1er mai 2020
Classification : Non classifiée
Secteur/agence : SCC
Question :
Les médias diffusent de l’information selon laquelle une poursuite intentée par un ex‑détenu sous responsabilité fédérale a été rejetée par une cour supérieure de l’Ontario. Dans le cadre de la contestation judiciaire, il avait été allégué que le fait de refuser aux détenus l’accès à des aiguilles stériles dans les prisons viole leurs droits constitutionnels puisqu’il s’agit de soins de santé essentiels.
Réponse suggérée :
- Le Service correctionnel du Canada examine attentivement la décision de la cour.
- Comme une grande partie de la société canadienne, le Service correctionnel du Canada subit les répercussions de la crise des opioïdes en tant que problème de santé.
- Le Programme d’échange de seringues dans les prisons permet aux détenus d’avoir accès à des aiguilles propres en tenant compte de la confidentialité et de la santé des délinquants, tout en assurant la sécurité des autres détenus et du personnel.
- Le Service correctionnel du Canada aborde la question du point de vue des soins de santé et de la réduction des méfaits, et a recours à diverses mesures pour veiller à la santé et la sécurité de tous.
- À ce jour, le Programme d’échange de seringues dans les prisons a été mis en œuvre à onze établissements, y compris plus récemment aux établissements de Warkworth et de Bowden. Aucune blessure impliquant le personnel ou les détenus n’a été signalée.
Contexte
La requête a été introduite en 2012, et il était allégué que le fait que le Service correctionnel du Canada (SCC) considère le matériel d’injection stérile comme des objets interdits violait les droits des détenus prévus aux articles 7 et 15 de la Charte. Les requérants, Steven Simons (un ex-détenu sous responsabilité fédérale) et plusieurs groupes de défense d’intérêt public, affirmaient que cette interdiction augmente le risque pour les détenus de contracter le VIH/sida.
En juin 2018, le SCC a entamé la mise en œuvre d’un programme d’échange de seringues dans les prisons (PESP) à deux établissements et s’est engagé à terminer la mise en œuvre à tous les établissements à l’échelle nationale d’ici août 2020. Le PESP permet l’accès à du matériel d’injection stérile et la possession de tel matériel sous réserve d’une évaluation de la menace et des risques (EMR). En septembre 2018, la Cour a ajourné l’affaire pour permettre au SCC de fournir d’autres preuves concernant le fonctionnement et l’efficacité du PESP.
Les requérants ont contesté le PESP au motif que le modèle adopté par le SCC n’est pas conforme à la Charte. Ils ont affirmé que le modèle n’est pas suffisamment confidentiel, qu’il ne sera pas utilisé et que, par conséquent, il expose les détenus au risque de contracter le VIH/sida. Les requérants ont également allégué que le gouvernement avait omis de fournir un accès efficace à du matériel d’injection stérile aux détenus qui consomment des drogues dans les prisons, conformément aux normes professionnelles acceptées, ce qui viole leurs droits à l’égalité prévus à l’article 15 de la Charte. La Cour a entendu la requête le 6 mars 2020.
Le PESP vise principalement à réduire le partage d’aiguilles entre les personnes qui s’injectent des drogues, à aider à prévenir les surdoses mortelles et non mortelles, et à favoriser les aiguillages vers les services de soins de santé.
En juin 2018, le SCC a commencé à mettre en œuvre le PESP dans ses établissements. À ce jour, le PESP a été mis en œuvre à onze établissements, dont plus récemment à l’Établissement de Warkworth et à l’Établissement de Bowden. Aucun incident de sécurité touchant le personnel ou les détenus n’a été signalé. Des consultations seront menées auprès des partenaires parallèlement à la mise en œuvre. Le PESP se poursuit dans les établissements où il a été mis en œuvre. On ne s’attend pas à ce que la mise en œuvre complète soit terminée avant 2021.
Avant le lancement du PESP, des objets pointus et tranchants se trouvaient dans les établissements pour l’injection d’insuline et, tout comme pour les EpiPen, des protocoles efficaces sont en place pour gérer leur présence en toute sécurité. Le SCC procède à une évaluation de la menace et des risques pour évaluer les préoccupations en matière de sécurité avant de déterminer quel détenu peut participer au PESP. Des mesures de protection appropriées ont été établies dans chaque établissement pour veiller à ce que les trousses du PESP soient entreposées de façon sécuritaire et comptabilisées adéquatement.
Évaluation du PESP
Une épidémiologiste sociale et chercheuse à l’École d’épidémiologie et de santé publique de l’Université d’Ottawa évalue actuellement le programme et son évaluation se déroulera en deux phases. Un rapport provisoire portant sur l’acceptation, l’attitude et les croyances du personnel et des détenus sera achevé au printemps 2020. Le rapport final, qui comprendra une évaluation qualitative et quantitative sera achevé au début de l’automne 2020.
Consultations sur le PESP auprès des agents négociateurs
Le SCC collabore avec les trois agents négociateurs, soit le Syndicat des employé-e-s de la Sécurité et de la Justice, l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada et le Syndicat des agents correctionnels du Canada – Confédération des syndicats nationaux, ainsi que ses partenaires concernant la mise en œuvre du PESP à l’échelle locale, régionale et nationale. Dans les établissements participants, la mise en œuvre a nécessité la mobilisation du personnel de l’établissement, y compris les trois agents négociateurs, la distribution de documents d’information au personnel et aux détenus, et la tenue de séances d’information à l’intention du personnel, de la direction, des comités consultatifs de citoyens, des comités de détenus, des comités de santé et de sécurité au travail et d’autres parties concernées. Le SCC utilisera la même approche pour lancer le PESP dans d’autres établissements à la grandeur du pays.
Compte tenu de la situation liée à la COVID-19, le SCC a suspendu temporairement le processus de consultation pour la mise en œuvre du PESP à d’autres établissements, puisque cela nécessite une consultation approfondie et des réunions en personne. Cette suspension est conforme aux lignes directrices de l’Agence de la santé publique du Canada concernant l’éloignement social.
Sécurité du personnel
Le SCC a acquis de l’expérience au chapitre de la gestion des détenus qui utilisent des seringues de manière sûre et sécuritaire dans le cadre de ses programmes actuels visant l’utilisation de l’EpiPen et de l’insuline pour le diabète. Un modèle d’évaluation de la menace et des risques semblable à celui qui est employé actuellement pour l’EpiPen et les aiguilles servant à l’injection d’insuline sera utilisé pour déterminer quels délinquants pourront participer au programme. Les facteurs de santé et de sécurité, comme la participation passée d’un détenu à des incidents liés à la sécurité, sont examinés. Le directeur de l’établissement ou le sous-directeur confirmera s’il existe des préoccupations en matière de sécurité qui empêcheraient le délinquant de participer au programme. La formation du personnel et la collaboration en cours avec les agents négociateurs et d’autres partenaires aideront à assurer la sécurité et la réussite de la mise en œuvre. Depuis le lancement du programme, on ne rapporte aucune agression impliquant des aiguilles dans les établissements participants.
Une fois inscrit au PESP, un détenu peut échanger l’ensemble de sa trousse du PESP pour une nouvelle au besoin. Des mesures de protection appropriées seront établies dans chaque établissement pour veiller à ce que les trousses du PESP soient comptabilisées adéquatement et entreposées de façon sécuritaire. Chaque établissement mettra en place une procédure quotidienne de vérification des trousses du PESP par le personnel. La trousse et son contenu seront visuellement inspectés et seront saisis s’ils semblent endommagés, s’il manque du contenu ou si certains éléments sont entreposés à l’extérieur de la trousse. Cela pourrait également entraîner une réévaluation de la participation d’un détenu au PESP, ainsi que des accusations d’infractions disciplinaires ou des mesures disciplinaires.
Personnes-ressources :
Préparé par : Stephan Dietz, agent, Relations parlementaires, 613-355-1224
Approuvé par : Kirstan Gagnon, commissaire adjointe, Communications et engagement, 613-995-6867
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